mercredi 9 mars 2011

Jour 11


Les visites ont été dirigées par Pablo Haumuller, coordonateur à l’Institut National de Recherche Agricole de Mendoza. La mission de cet institut est double : un volet de recherche technique afin d’améliorer la production au niveau du producteur et un volet plus social, qui est d’informer les producteurs de la région de Mendoza des possibilités s’offrant à eux pour améliorer leur niveau scolarisation et de permettre une meilleure communication entre les entreprises. Le but optimal vise à générer des rendements suffisamment élevés afin d’assurer la survie des entreprises de cette région désertique. Les conditions climatiques sont propices aux sécheresses dues au manque d’eau et à la dureté des hivers. La température varie entre 40° et -10°. D’ailleurs, ces conditions arides prédisposent à la mortalité des animaux dû à la pénurie alimentaire, en raison du peu de moyens dont disposent les agriculteurs de cette vaste zone. Notre première visite s’est déroulée dans une entreprise familiale d’élevage de chèvres située dans la zone périphérique de la Cordillère des Andes. Cette entreprise revêt un caractère de subsistance par l’élevage de petits animaux pour la consommation personnelle et par la confection d’objets en cuir. Les revenus générés de cette entreprise familiale proviennent de la vente de la viande de chèvres (40%), des fumiers (30%) et du lait, fromage et cuir (30%). Le revenu moyen d’une entreprise de ce type est de 1200 pesos par mois ce qui équivaut en dollars canadiens à 300$. Le fumier s’avère le revenu stable de la ferme, grâce aux besoins éminents de fertilisation des vignobles de la région. Le fond de terre des 1000 hectares appartient à la famille de Monsieur Danyel Martin, qui habite sur les lieux et travaille à titre d’économiste/sociologue auprès des producteurs agricoles de la région. Les sols non cultivables, ne peuvent servir de pâturage en raison de leur aridité. L’exploitation de chèvres, c’est-à-dire le droit de produire, appartient à un gérant propriétaire, Monsieur Nardo. Ce droit se transfère de père en fils ce qui lui confère une valeur marchande. La valeur monétaire des terres est faible en raison du manque d’eau. S’il y a présence de nappe phréatique ou de possibilité d’acheminement de l’eau des sommets des Andes, la valeur des terres grimpera. Dans l’éventualité de présence d’un puits de pétrole, la compensation au producteur couvre seulement le périmètre entourant la superficie du puits et non tout le parcours pour l’atteindre. Cette compensation couvre le revenu perdu par l’entreprise pour la superficie utilisée par la compagnie pétrolière, et ce indépendamment des possibles contaminations sur la terre du producteur. En guise de soins techniques, M. Nardo vermifuge ses chèvres contre les mouches et traite aussi pour les bactéries et les parasites présents dans l´eau d’abreuvement des animaux. Les principales bactéries présentes dans les troupeaux argentins sont le clostridium, la brucelose et la paratuberculose qui sont potentiellement transmissibles à l’homme. M. Nardo alimente ses chèvres principalement de foin et de concentrés de mais, soya et de luzerne lors de la traite. Le poids carcasse des chevreaux, requis à la vente, est d´environ 8 à 10 kg. Toute la mise en marché se fait par le propriétaire lui-même. La demande de viande de chevreaux est orientée en fonction d’offrir une relative abondance du produit pour coïncider avec certaines fêtes argentines. L’aide apportée aux jeunes désireux de prendre la relève repose principalement sur l’instruction et la formation, avec un programme d’une durée de 3 ans vise à parfaire l’instruction de la relève. La relève est exclusivement au sein de la famille et ne provient nullement de l’extérieur. Pour terminer cette très agréable visite, les producteurs nous ont accueillis avec une grande générosité pour déguster leur fromage de chèvres fabriqué à la ferme, accompagné de mate et de confiture aux prunes confectionnés par Hector, le mari de Daniel Martin. Cet échange amical a permis de savourer les produits, d’échanger avec nos hôtes et de savourer la quiétude du décor de la Cordillère des Andes. Dans la région de Tupungato, nous avons également visité un vignoble de 4.5 hectares produisant différents types de raisins pour la fabrication de vin. Deux méthodes de production sont présentes chez ce vignoble. La première, dite verticale, avec les vignes qui sont disposées en rang et confinées par des filets sur toutes les longueurs des rangs et ce, dans le but de faciliter la récolte et les manipulations. La deuxième méthode est basée sur la croissance des vignes de façon horizontale. Les branches sont soutenues par des fils de fer et poussent naturellement. Cette méthode favorisent la qualité de la récolte car elle empêche les raisins d’atteindre le sol. Un autre avantage important, cette technique limite l’accès aux oiseaux puisque les vignes en viennent à former un tapis uni, tout en protégeant les raisins du rayonnement solaire direct. Sur cette ferme, le rendement est moindre que sur les autres vignobles, puisque les efforts de production sont davantage pour la qualité du raisin que pour la quantité. Le sol riche en potassium et en matière organique sont très favorables à la qualité du produit. L´irrigation se fait par gravité et l´eau provient de la fonte des neiges des glaciers, amenés par la rivière Mendoza, dont les eaux sont redistribuées via un système sous-terrain et aérien dans l’ensemble de la région de Mendoza. Le producteur produit des vins blancs et rouges et les variétés retrouvées sont principalement le cabernet sauvignon, le torontes et le malbec. Le processus de production se résume à l’installation des fils de fer à la sortie des bourgeons afin de soutenir les plants et les orienter, le tout suspendu sur des poteaux de bois à intervalle régulier. S’ensuit le débourrement et la première application de substance curative contre les maladies telles que l’oidium, la pourriture et le botritus. Lorsque l’apparition du raisin se manifeste, à 10 cm de bourgeonnement, une deuxième application s’ensuit. La dernière application sera faite juste avant la récolte afin d´empêcher la pourriture et l’endommagement de la grappe. La récolte se fait manuellement à l´aide de ciseaux et les raisins sont déposés dans des boites de 20 kg. Nous avons par la suite dîné dans une auberge agrotouristique, La Gertrudise. Cette entreprise familiale, opérant en coopération avec d´autres producteurs, offre un gîte et des repas de qualité à leurs clients. La crise économique de 2001 a secoué de nombreux producteurs dont Daniel Salvatico et Claudia Fragala menant certains à la faillite. Ils ont donné une nouvelle vocation à leur entreprise en se dirigeant vers l’agrotourisme en partage avec d’autres producteurs ce qui améliore leur chance de réussite. Le défi de taille relevé par Daniel et Claudia repose sur la réussite d’attirer des clients en étant dans une région dénudée d’attrait touristique. Leur seul atout, l’hospitalité et la communication avec leur client, fait qu’ils réussissent à se créer une clientèle internationale. En 2007, ils ont gagné une compétition nationale de l’agrotourisme, ce qui leur donne une reconnaissance et une bonne page publicitaire. Accueillis dans une grande salle de réception modeste et chaleureuse, nous avons savouré le poulet aux légumes enrobé d’une feuille de chou, repas traditionnellement argentin. Ils anticipent prendre de l’expansion en ajoutant des occupations de gîte. Claudia nous a généreusement présenté son entreprise avec un enthousiasme contagieux. Tout de suite après le repas, nous avons visité une des nombreuses « bodega » de la région, à San Carlos sud, le Coopérative de vin, Vitivinicola qui a vu le jour en 1953. Plus de 45 membres apportent leur récolte pour la transformation des raisins. La mise en marché est planifiée et un agronome contrôle les vignes des fournisseurs ce qui assure une bonne qualité des produits et assure une uniformité. Chaque producteur apporte ses raisins avec son camion afin d`être pesé pour mesurer la quantité apportée. Le raisin est ensuite broyé, puis refroidi rapidement grâce à un système d’échange de chaleur par conduction avec de l’eau froide. La température doit être ajusté à 15 ° pour le vin blanc et 28 ° pour le vin rouge. La presse pneumatique fait remonter le vin dans les réservoirs qui est, dès lors, induit de gaz carbonique afin d´empêcher l´oxydation. Ainsi avec 100 kg de raisins, ils produisent 80 litres de vin. Chaque réservoir de l’entreprise peut contenir 13 millions de litres. De plus, le vin rouge prend 15-20 jours pour fermenter et le vin blanc 15 jours. La fermentation est complètement naturelle. Dans les réservoirs, un mélangeur sert à maintenir les particules en suspension. Le bentonite est aussi un matériau très important servant à éclaircir le vin et à attirer les particules en suspension pour former des particules plus grosses qui descendront plus vite au fond du réservoir par précipitation.La journée s’est terminée par la visite d’un pomiculteur. Le propriétaire Hugo Refumen, passionné d’agriculture, produit principalement des pommes Royal Gala et Galaxie. Ses ventes vont principalement à l´exportation aux États-Unis et au Brésil. Les pommes détériorées par les conditions climatiques, comme la grêle, sont vendues sur le marché local. Le prix de vente obtenu est l’équivalent de 1 dollar canadien le kg. Une caisse contient 500 kg de pomme. La superficie de la ferme est de 6,5 hectares dont 1000 plants de pommiers par hectare. À tous les 8 jours, le sol est irrigué par gravité de l´eau en provenance des montagnes. À cause de la forte densité des mouches, Hugo arrose ses pommiers avec des pesticides. Si toutefois, la quantité appliquée n’est pas suffisante, la pose de pièges servira à doser la deuxième application. La pose des pièges se fait après la floraison avec un ratio de 1 aux 2 plants. Tous les pesticides utilisés doivent être signés et approuvés par des techniciens. Le propriétaire s’assure de respecter l’homologation des produits dans les pays importateurs. Un système de traçabilité mis en place par la pose d’étiquette sur la benne identifie le nom du producteur, la variété de la pomme et le lieu de production. Avant la vente, les pommes sont réfrigérées soit dans un entrepôt frigorifique avec ou non un système à atmosphère contrôlée. Les pommes servent à la transformation, soit pour les jus ou les autres produits connexes. Pour l’ensemble de sa production, 25 % des pommes sont vendues pour l´exportation, 17 % pour la consommation locale et le reste pour la transformation. Nous avons aussi dégusté les pommes produites à la ferme.

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